Imaginez six enfants, trois garçons et trois filles, dans un gymnase. Une tâche simple leur est confiée : classer les ballons de couleur dans des paniers distincts. Le chaos s’installe et, à la fin du jeu, les enfants ferment les yeux et attendent leur récompense : un gobelet de bonbons.
Sauf que certains gobelets contiennent plus de bonbons que d’autres.
« Tu en as plus que moi », dit une fille en plaisantant.
« Comment se fait-il que tu en aies reçu autant alors que nous avons fait le même travail? » demande une autre fille.
À la fin, les enfants partagent leurs bonbons afin que chaque participant ait droit à la même quantité. « Parce que nous avons pas mal tous fait la même chose », dit l’un des garçons.
Le but de cette vidéo? Elle donne aux enfants une explication simple d’un problème qui ne l’est pas tant que ça : l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes. Cet article traite de l’égalité de rémunération, des causes de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes et de la manière d’en parler à vos enfants et à vos ados.
Qu’est-ce que l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes?
Lorsque les gens parlent de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes (ou d’écart salarial), on fait référence à la différence de salaire moyen entre les hommes et les femmes. L’écart peut être mesuré à l’aide de différents paramètres, notamment le salaire annuel moyen, le salaire horaire et le travail à temps partiel. Cet écart, généralement exprimé en cents par dollar gagné par les femmes par rapport aux hommes, reflète les inégalités de notre société, des inégalités qui peuvent perdurer tout au long de la vie d’une femme. En effet, l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes s’avère être l’une des principales causes de la pauvreté chez les femmes.
Y a-t-il une égalité de rémunération au Canada?
La réponse courte est non.
Actuellement, les femmes ne bénéficient pas de l’égalité de rémunération. En 2021, les travailleuses à temps partiel et à temps plein gagnaient 89 cents pour chaque dollar gagné par les hommes. Selon les statistiques de 2019, si l’on tient compte des salaires annuels et des commissions, ce montant était de 71 cents pour chaque dollar gagné par un homme. Bien que la différence entre 89 cents et 1 $ ne semble pas énorme, il ne faut pas oublier qu’elle s’accumulera tout au long de la carrière d’une femme.
Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), avec 16,1 %, le Canada se situe au huitième rang des 43 pays où l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes est le plus important (le Costa Rica occupe la première place avec seulement 2,6 %). En 2015, le Comité des droits de l’homme des Nations unies s’est inquiété des « inégalités persistantes entre les femmes et les hommes » au Canada, en particulier du « niveau élevé de l’écart de rémunération » qui s’aggrave en Alberta et en Nouvelle-Écosse. Mais l’écart salarial n’est pas seulement associé au sexe de la personne. La discrimination peut être un facteur important. Par exemple, pour les femmes racisées, les femmes 2SLGBTQ+, les femmes autochtones et les personnes handicapées, l’écart est encore plus grand. Comparez le salaire annuel des hommes non racisés au Canada à celui des femmes racisées.
En moyenne, les hommes blancs gagnent 56 920 $ vs 31 900 $ pour les femmes racisées. Cela représente une différence de près de 44 %. Bien que l’écart ne soit pas aussi prononcé entre les femmes racisées et les femmes non racisées au Canada (31 900 $ vs 38 247 $), l’écart salarial racial représente tout de même une énorme différence au cours d’une vie entière de travail.
Qu’est-ce que la Journée de l’égalité de rémunération?
Journée symbolique consacrée à la sensibilisation à l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes, la Journée de l’égalité de rémunération souligne que les femmes doivent travailler plus longtemps que les hommes pour gagner le même salaire.
Quelle est la date de la Journée internationale de l’égalité de rémunération au Canada?
La Journée internationale de l’égalité de rémunération au Canada a eu lieu le 4 avril 2023. Elle symbolise la durée pendant laquelle la femme moyenne devra travailler l’année suivante pour gagner ce que l’homme moyen a gagné l’année précédente.
Quelles sont les causes de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes?
Historiquement, l’écart salarial s’explique par la croyance selon laquelle les hommes étaient les soutiens de famille et les femmes, les dispensatrices de soins. Les femmes avaient un niveau d’éducation plus faible, elles étaient moins nombreuses sur le marché du travail et celles qui travaillaient étaient concentrées dans des secteurs traditionnellement féminins (et donc moins bien rémunérés), comme le travail de bureau et le travail en usine.
Il existait également des préjugés culturels selon lesquels les femmes avaient de meilleures aptitudes pour le travail administratif répétitif. (Ce balado montre que cette idée est toujours d’actualité. Siri et Alexa. Qu’ont en commun ces deux technologies? Elles sont la version moderne de l’adjoint administratif, mais elles ont des voix féminines.)
Dans les années 1960 et 1970, les femmes ont connu de nombreuses premières – première femme première ministre, première femme dans l’espace, première femme nommée à la Cour suprême – et elles sont devenues de plus en plus nombreuses à poursuivre des études postsecondaires. Cet enseignement supérieur leur a ouvert les portes de professions traditionnellement réservées aux hommes.
Le capital humain (l’idée que les compétences, le talent, l’expérience et les connaissances aident une personne à être productive) ne pouvait plus être à l’origine de l’écart de rémunération. Pourtant, l’écart salarial a diminué, mais il a atteint un plateau et s’est mis à stagner.
Plusieurs raisons expliquent l’écart salarial. Selon une étude récente menée au Danemark, la disparité n’est pas due au fait d’être une femme, mais au fait d’être une mère. En raison des normes culturelles selon lesquelles la garde d’enfants est avant tout un « travail de femme », les recherches montrent que ce sont plus souvent les femmes qui se tournent vers des emplois et des secteurs considérés comme étant plus « favorables à la famille », c’est-à-dire plus flexibles pour elles. Cela se traduit par la perte d’occasions de pouvoir consacrer plus d’heures au travail, d’obtenir des promotions et des augmentations de salaires, ce que l’on appelle communément la « pénalité de la maternité ». C’est là que le bât blesse. Il est à noter que l’écart salarial est considérablement moindre chez les femmes sans enfants.
Une autre étude de Cornell, aux États-Unis, a montré que les professions et les secteurs à prédominance féminine (les « emplois de femme », comme l’éducation et les services sociaux) sont moins bien rémunérés que ceux des hommes (comme l’ingénierie, la technologie et les affaires), et ce, en dépit de niveaux d’éducation et d’expérience comparables. Même les femmes exerçant des métiers qualifiés gagnent environ la moitié de ce que gagnent les hommes, principalement parce qu’elles sont concentrées dans des domaines moins bien rémunérés, comme la cuisine, la pâtisserie et la coiffure. Les femmes sont aussi plus réticentes à négocier les salaires, les augmentations ou les promotions, parce qu’elles sont conditionnées à l’idée que cela les rend insistantes ou dominatrices.
L’écart salarial n’affecte pas seulement les femmes adultes; selon une étude récente des Guides du Canada, l’écart salarial commence bien plus tôt. Pour un travail d’été à temps plein, les filles de 12 à 18 ans ont déclaré gagner trois dollars de moins l’heure que les garçons. Les filles occupent également des emplois moins bien rémunérés du « ghetto rose », comme les soins (gardiennage d’enfants ou soins aux personnes âgées), la restauration et le commerce de détail, tandis que les garçons sont plus nombreux dans les secteurs de l’entretien, du jardinage ou de l’entretien des terrains.
De quelle manière l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes affecte-t-il la société?
Les impacts de l’écart de rémunération sont considérables : non seulement les femmes disposent de moins d’argent à dépenser et à épargner pendant leurs années de travail, mais leurs revenus plus faibles et leur carrière entrecoupée les pénalisent au moment de la retraite. Les femmes sont généralement moins en mesure d’épargner et elles ont également accès à des prestations moins importantes, comme le Régime de pensions du Canada, car les versements sont déterminés par les cotisations versées au cours de la vie active.
Cette disparité a été aggravée par la pandémie de COVID-19. Selon un rapport de RBC Economics, on estime qu’en avril 2020, 1,5 million de femmes avaient perdu leur emploi et que leur taux de participation à la vie active n’était plus que de 55 %, soit le taux le plus faible depuis le milieu des années 1980.
La majorité des pertes se sont produites dans l’hôtellerie, la restauration et le commerce de détail, des secteurs dominés par les femmes et moins propices au télétravail. En comparaison, les hommes exerçant une profession libérale, scientifique ou technique s’en sont mieux sortis, car le télétravail était beaucoup plus facile ou parce qu’ils travaillaient dans des secteurs jugés essentiels, comme la construction.
Les femmes sont également plus susceptibles de « quitter » le marché du travail; en octobre 2020 près de 21 000 femmes ont choisi de ne pas retourner au travail, en grande partie parce qu’elles devaient rester avec leurs enfants qui suivaient leur cours à distance à la maison.
Conseils pour parler de l’écart salarial aux enfants et aux ados
Comme le montre l’étude des Guides, l’écart salarial peut commencer dès l’adolescence. Même à la maison, certains parents peuvent inconsciemment répartir les tâches en fonction du sexe (ménage ou cuisine pour les filles, travaux de jardinage et d’entretien de la maison pour les garçons). Les tâches sont un excellent moyen d’enseigner aux enfants l’égalité des sexes. Lors de leur attribution, veillez à ce que les garçons et les filles participent de manière égale et accomplissent des tâches à l’intérieur et à l’extérieur de la maison. Par exemple, les filles pourraient tondre la pelouse et les garçons pourraient faire la lessive.
Parler d’argent est souvent considéré comme « tabou », mais la transparence salariale, c’est-à-dire le fait de partager ouvertement les détails de la rémunération, peut contribuer grandement à réduire l’écart salarial. Il serait bien, par exemple, d’apprendre aux préados et aux ados, en particulier aux filles, qu’il n’est pas inapproprié de demander à un employeur potentiel quelle sera sa rémunération avant d’accepter un emploi, mais qu’il s’agit au contraire d’une nécessité.
Apprendre aux enfants (en particulier aux filles) à négocier leur permet d’acquérir une compétence précieuse qui peut avoir une incidence considérable sur leurs revenus tout au long de leur vie.
La recherche d’emploi est difficile, quel que soit l’âge; il est donc essentiel de rappeler aux enfants quelle est leur valeur. Si votre préado ou votre ado envisage un emploi d’été traditionnellement occupé par les garçons (par exemple, paysagiste ou arbitre au soccer), incitez-la à se lancer! Ensuite, apprenez-lui à demander un aperçu des attentes afin qu’elle sache clairement quelles sont les tâches pour lesquelles elle sera payée.
Les filles représentent une part importante de notre future main-d’œuvre et le fait de sensibiliser les préados et les ados à l’écart de rémunération contribue à bâtir un avenir où ils n’auront plus besoin d’une Journée de l’égalité de rémunération.
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Cet article ne contient que des renseignements généraux et ne constitue pas un conseil juridique, financier ou professionnel. Il convient de consulter un conseiller professionnel au sujet de votre situation particulière. Bien que les renseignements présentés soient considérés comme factuels et actuels, leur exactitude n’est pas garantie et ils ne doivent pas être perçus comme une analyse complète des sujets abordés. Toutes les opinions exprimées reflètent le jugement de l’auteur·e ou des auteur·e·s à la date de publication et sont susceptibles de changer. La Banque Royale du Canada et ses sociétés affiliées n’approuvent pas expressément ou implicitement les tiers ou leurs conseils, opinions, informations, produits ou services.